White Shadows Quand un jeune studio indépendant essaye de prendre modèle sur Inside, cela donne White Shadows.
Il n'est pas facile de faire ses gammes dans le monde des jeux vidéo. On en a vu des développeurs qui ont eu les yeux plus gros que le ventre. Et quand on parle de petits studios, c'est encore plus compliqué. En général, on s'attaque à des choses simples, pour se mettre en jambe. Les développeurs de chez Monokel, eux, ont décidé de faire un premier jeu dans le genre de Inside. Tout simplement. Pour rappel, Inside est le premier titre (et un des seuls d'ailleurs) à avoir décroché une note de 90. Alors oui, Monokel est un studio ambitieux, mais est-ce que White Shadows est un bon jeu pour autant ?
White Shadows est un jeu de plateforme en 2D où on incarne la petite Corneille (un petit corbeau pour ceux qui pensent qu'on contrôle un chanteur). Dans ce titre où la narration est faite par l'image, avec des séquences vraiment intenses et même très dures par moment, on va devoir aider Corneille à s'échapper d'un monde dystopique brutal où l'oppression et la violence la placent tout en bas de l'échelle sociale. En effet dans White Shadows, le système des castes est simple : les loups au sommet qui contrôlent le monde, les cochons au milieu consommateurs de batteries pour se protéger de l'obscurité, et en bas, les oiseaux qui sont diabolisés pour avoir apporté les ténèbres et la maladie. Comme on le voit souvent par des messages dans la ville : "tous les animaux sont égaux... sauf les oiseaux". L'histoire du jeu est subjective mais on sent le côté dépressif, oppresseur et... sombre. Il faudra atteindre la dernière partie du jeu pour avoir une explication plus claire sur l'histoire, et malgré tout, il restera des zones d'ombres.
La description du jeu nous indique que "perdue dans un vaste réseau de tours s'élevant des ténèbres, Corneille l'aventurière devra éviter des pièges mortels et sauter sur des structures fragiles, tout en faisant attention à ne pas se faire repérer par des gardes prêts à l'abattre". Le terme "aventurière" pour définir Corneille est totalement justifié, même si son aventure c'est plutôt de la survie. En tout cas, et comme dans Inside, il n'y a aucun temps mort. On doit survivre, sauver sa peau, tout en essayant de comprendre ce qui se passe de manière plus concrète. Le jeu commence avec Corneille qui sort d'une horloge. Pourquoi cet oiseau est là ? Pourquoi elle semble fuir ? Quel est le but final de tout cela ? Je ne vous dirai rien, pour ne pas gâcher l'expérience, ni risquer de vous spoiler quelques passages très forts (comme une sorte de show TV) car c'est la découverte de ce monde qui est la force de White Shadows.
Et cette force est mise en valeur par la direction artistique du titre. White Shadows est magnifique dans son genre. Son design monochrome est de toute beauté, avec des arrière-plans complètement dingues et des effets de lumière très réussis. White Shadows joue énormément sur les teintes de gris, sur les ombres, ou même la violence de la lumière. Il semble se dégager un brouillard constant dans ce monde, comme si la pollution lumineuse troublait l'air ambiant. C'est franchement une réussite à tous les niveaux sur le plan artistique. A côté de cela, il faut se rappeler que c'est un jeu indépendant, et mine de rien le premier jeu du studio, donc tout n'est pas parfait. Les animations sont assez limitées, il y a quelques bugs graphiques (personnages qui scintillent ou disparaissent en arrière plan) ou de collisions. Ce ne sont pas des défauts horribles, mais cela gâche un peu la belle direction artistique du titre. La bande son compensera facilement ces petits problèmes techniques cela dit. Elle sait se faire discrète quand il faut, que ce soit pour les bruitages ou la musique, mais quand il le faut, cela tape fort. Monokel a tenté le coup d'utiliser des morceaux de musique classique pour son titre, et même si c'est risqué de prendre des musiques connues de tous pour donner une personnalité à son jeu, et bien, dans le cas de White Shadows c'est une réussite. Lorsqu'on joue sur des notes du Danube Bleu ou de la Chevauchée des Walkyries, et bien quand c'est bien mis en scène, c'est génial. J'ai kiffé ces moments.
Le gameplay de White Shadows est des plus basiques, et c'est normal dans ce genre de titre. En gros, on bouge sur un plan de gauche à droite, et de haut en bas quand on peut, on saute avec un bouton et on peut déplacer un objet ou utiliser un mécanisme avec un autre bouton. Basta. On ne se fera pas de nœud au cerveau niveau mémorisation des touches. Les énigmes du jeu sont plutôt simples également. Il n'y a rien de compliquer, vous ne serez jamais bloqué. En général, il faut déplacer une caisse pour appuyer sur un interrupteur ou atteindre une plateforme trop haute pour Corneille. Simple, basique. Quelques séquences sont de la pure plateforme, comme celle sur un monorail où il faudra éviter des obstacles ou sauter sur un autre monorail. Mais rien de bien complexe non plus. Si vous cherchez un challenge dans la plateforme ou dans le casse-tête, vous serez déçu. On joue à White Shadows pour son ambiance, sa mise en scène, sa direction artistique, bref son histoire. Les phases de gameplay tiennent la route même si parfois on sent que le personnage est un peu pataud. Le gameplay a le mérite d'être tout sauf frustrant, même si il n'invente rien de bien nouveau pour les habitués du genre. Pour finir, il faut compter 2h30 pour atteindre le bout de cette aventure.
En conclusion, White Shadows est un bon jeu, un beau jeu même et surtout un vrai coup de cœur. Malgré quelques petits défauts de finition et un personnage parfois un peu pataud, j'ai vraiment adoré parcourir le titre d'une traite. Il n'y a aucun temps mort, on n'a pas le temps de s'ennuyer et on veut avoir le fin mot de cette aventure. Avec leur premier jeu, Monokel a presque réussi le sans faute. Chapeau !